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2 octobre 2008

EVENEMENT/APRES LES JO,LES CHINOIS EN ORBITE

Réussite totale des Taïkonautes chinois, sortie de Zhai Zhigang

Zhai_zhigang_retour Les trois Taïkonautes du troisième vol spatial habité chinois sont revenus sur Terre dimanche. Et ont aussitôt enchaîné les manifestations de triomphe, avec défilés en voiture décapotable, dans le style... des premiers astronautes américains.

Le troisième vol habité chinois a en effet tourné à la démonstration. Il s'est déroulé avant même la date prévue et a permis à Zhai Zhigang de réaliser leur première sortie dans l'espace, dans un scaphandre inspiré de l'Orlan russe mais de fabrication chinoise. Les autorités chinoises, et en particulier Hu Jintao, se sont empressées de voir dans ce succès technologique la preuve que la Chine était maintenant devenue une grande puissance scientifique et technologique... mais aussi une raison, pour la population, de leur faire confiance.

Voici, ci-dessous, le point de vue d'Isabelle Sourbes-Verger, géographe, spécialiste des activités spatiales, travaille au Laboratoire Communication et Politique du Cnrs. Auteur de plusieurs ouvrages sur les technologies spatiales, elle vient de publier « Un empire très céleste » (Editions Dunod) sur le spatial chinois.

Que pensez vous de ce troisième vol habité mené par la Chine ?

Isabelle Sourbes-Verger : C'est manifestement un plein succès pour les Chinois. Ils ont atteint tous leurs objectifs. Je suis d'ailleurs persuadée que le premier d'entre eux, c'était l'opinion publique chinoise. Pour la frapper, les responsables ont pris Ie risque de transmettre en direct le lancement et la sortie dans l'espace de Zhai Zhigang. Une manière d'opérer qui veut démontrer une volonté de transparence, au

service d'une nouvelle image de l' Armée populaire de libération - l'armée chinoise dirige ce programme spatial - très portée sur les nouvelles technologies et donnant une dimension pacifique à ses activités. Des mots d'ordres qui se prêtent bien à un discours positif.

D'un point de vue plus spécialisé, technique, la Chine réaffirme avec force l'idée qu'elle dispose d'un programme spatial qui avance, à chaque vol habité, mais aussi avec le lancement d'un satellite de télécommunication qui était nécessaire à la retransmission en direct de la sortie dans l'espace, samedi, du Taïkonaute. Un programme dont la suite officiellement annoncée serait la mise en orbite d'une mini-station spatiale. Avec un premier tir, dès 2011, d'un module automatique, suivi d'un second qui s'y accrocherait automatiquement, puis d'un vol habité pour inaugurer cette station.

Ce message que les autorités chinoise veulent tenir, quelle est sa signification ?

Isabelle Sourbes-Verger : Pour les dirigeants chinois, l'essentiel est manifestement d'affirmer que laLongue_marche_et_shenzhou_7 maitrise de la chaine technologique spatiale constitue la preuve que la Chine est devenue un pays technologiquement développé, qu'elle peut ambitionner d'être à parité avec les grandes puissances. De quoi participer du renforcement de la confiance envers les dirigeants politique, dans un contexte - lait contaminé, écroulement d'écoles lors du tremblement de Terre – où cette confiance avait besoin d'être renforcée.

La Chine veut démontrer qu'elle est capable de manager un grand programme technologique, avec beaucoup de gens différents. Et c'est incontestable, il y a une vraie démonstration de compétence, de la fiabilité des produits, des systèmes, des ingénieurs, de l'organisation. De ce point de vue, le spatial est un test sévère : il faut que tout fonctionne, du premier au dernier boulon, sinon c'est l'échec. Les entreprises spatiales chinoises se sont modernisées, elle envisagent des partenariats avec l'étranger. Elles font le choix de système proches des standards occidentaux, mais sans tomber dans le piège de l'hyper-sophistication technique, en raison de leurs budgets limités, et de la leçon russe...

Vis à vis de l'Occident, ils veulent se faire reconnaître comme partenaire à rang égal des puissances spatiales, mais aussi économiques ou politiques. Le plus étonnant, d'ailleurs, c'est que  je n'ai jamais vu de déclaration chinoise prétendant à l'égalité avec les USA, dans le domaine spatial en particulier. Alors qu'il y eu, aux Etats-Unis, des hommes politiques pour tenir ce discours, jouer à se faire peur en parlant d'une Chine qui allait « conquérir la Lune ». Une fois cet habillage médiatique extérieur réalisé, les Chinois l'ont parfois repris...

Les_trois_takonautes_du_vol_n3_2 Les Chinois maîtrisent-ils vraiment les technologies spatiales ? Leurs scaphandres et leur capsules ressemblent de fort près à ce que les Russes font ?

Isabelle Sourbes-Verger : Ils se sont réapproprié les technologies, car ils les fabriquent ces objets, même s'ils n'ont pas innové et qu'ils ont beaucoup acquis de technologies russes. Les Russes disent : on a pas encore vu les Chinois réaliser une idée nouvelle qui soit une autre option que ce qui a déjà été fait. Mais l'objectif chinois c'était de faire aussi bien que ce qui a été fait, pas de révolutionner la technologie spatiale. Du coup, je suis très dubitative sur les soi-disant ambitions énormes de la Chine en matière spatiale. D'ailleurs le budget spatial chinois demeure limité et il n'a fait place que récemment au vol habité, bien après l'espace « utile » : météo, télécoms, observation. La Chine veut combler son retard technologique dans tous les domaines, et non sacrifier cet effort à un spatial de prestige boursouflé. Cela se vérifie dans le rythme de leurs vols : ils prennent leur temps, se donnent des marges de sécurité – le vol a eu lieu avant la date prévue – veulent montrer une image de maîtrise et non de précipitation.

Lors du premier vol habité, certains ont agité, et continuent de le faire, le risque d'un volet militaire ?

Isabelle Sourbes-Verger : C'est absurde. Les fusées utilisées pour un vol habités, les capsules, une station et les astronautes eux mêmes n'ont aucun intérêt militaire. Equiper une station avec un laser pour détruire un satellite, c'est idiot puisqu'une station représente une cible magnifique.... Même le programme spatial militaire US, le plus important du monde et de très loin, ne poursuit de telles chimères. Le vrai effet militaire, c'est  un renforcement de l'image de l'armée...

Y aura t-il une nouvelle course à la Lune ?

Isabelle Sourbes-Verger : je ne crois pas. C'est juste que le seul satellite naturel de la Terre c'est la Lune et donc pour expérimenter des technologies spatiales vous vous y retrouvez... avec les autres. Dans cette affaire, c'est plutôt la communauté spatiale américaine qui a un problème de justification de son programme lunaire très ambitieux – pour cause puisqu'elle ne peut pas proposer de refaire Apollo, il lui faut quelque chose de plus grand... -  qui conduit certains à relancer un argumentaire style guerre froide. Les Américains ont plus besoin de trouver des raisons de déclarer urgent le retour sur la Lune que les Chinois. Ce sont eux, notamment dans la communauté spatiale, qui veulent instrumentaliser les activités chinoises pour justifier leur demandes de crédits... dans un contexte économique où la crise financière risque de n'être pas en leur faveur. Quant aux discours sur les ressources de la Lune à exploiter, ils ne sont pas sérieux

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